de Anna Hope, Gallimard
C’est un roman comme je les aime, avec de magnifiques portraits ciselés, où l’intrigue est menée par petites touches, de main de maître, sans évidence et attendu. Des femmes touchantes dans leur deuil d’un fils, d’un fiancé, d’un frère, des hommes cassés par cette fichue guerre de 14 qui marque la fin d’une société. Une guerre qui n’était plus celle des corps à corps mais pas encore celle de la mort à distance, où l’on voyait les corps de ses frères combattants agoniser à côté, tremblant de terreur, quelque soit la couleur de l’uniforme et le grade sur les épaulettes. Ces quelques jours avant l’arrivée du corps du soldat inconnu en 1920 en Angleterre marquent le bouleversement du deuil de ces femmes, et à travers ce cercueil anonyme, de tout un peuple. J’ai apprécié l’absence de jugement, parce que l’héroïsme et la désertion ne sont pas blanc ou noir, plutôt gris, ou couleur de fange. Comme tous les livres qu’on aime, on sent un petit arrachement à laisser ces femmes, pas forcément sympathiques, mais si humaines, si faiblement humaines.